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REVUE DE PRESSE FEMININE & FEMINISTE
SOMMAIRE
ACTION URGENTE POUR SAFIYA LUNDI 18 MARS INDE: Ngawang Sangdrol : chanteuse de la liberté LISTE DE PRISONNIERS ARABIE SAOUDITE: Les femmes mineures à vie Action contre le publisexisme France : un bien triste 8 mars ! UNE DRÔLE DE JOURNÉE DES FEMMES ! Palestine :
L’APPEL INTERNATIONAL DES FEMMES :LE PEUPLE PALESTINIEN NE PEUT PLUS ATTENDRE… France : pétition pour des sanctions véritables contre le viol :LE VIOL, CA
SUFFIT ! UNE FEMME D'HONNEUR:Ingrid Betancourt défie la narcomafia - Envoyer la pétition par email LIENS
"Aujourd'hui les femmes se mobilisent. Et quand les femmes se mobilisent au sein d'une nation, elles sont la voix la plus forte que l'on puisse entendre, une voix qu'il est impossible de reduire au silence." Diane REED
URGENT - URGENT Sauvons Safiya Hussaini !
PROCES PREVU LUNDI 18 MARS AJOURNE AU 25 MARS 2002
En attendant, il faut continuer à faire signer la pétition en ligne : http://afrik.com/petition.php ou l'envoyer par courrier : Femmes Solidaires 25 rue du Charolais 75012 Paris ou Marche mondiale des
femmes/CNDF 104 rue des Couronnes 75020 Paris marchfem@ras.eu.org ou Mr l'Ambassadeur, Ambassade du Nigeria, 173 avenue Victor Hugo 75016 Paris, Fax : 01 47 04 47 54. mail:
embassy@nigeriaparis.com
INDE
Ngawang Sangdrol chanteuse de la liberté
Poursuivant l'action qu'il mène pour la libération de tous les prisonniers d'opinion détenus par la Chine au Tibet, le CSPT, en commun avec Monsieur Yann Galut, député du Cher, a rendu public, le mardi 25 avril, un nouvel appel en faveur de Ngawang Sangdrol, condamnée à 21 ans de détention sans jamais avoir commis de délit ou de violence.
Ce jour marque également le 11ème anniversaire du plus jeune détenu politique du monde, Gendun Choekyi Nyima, reconnu comme le Panchen Lama par le XIVème Dalaï Lama et dont on est sans nouvelles depuis 5 ans.
Cet appel a été signé par plus de 250 personalités de la littérature, du spectacle, du cinéma, du sport, des acteurs importants de la société civile, du monde politique.
L'appel et les signataires de celui-ci. Le communiqué de presse du CSPT. Joignez-vous à l'appel signé par plus de 250 personnalités, vous aussi signez l'appel en faveur de Ngawang Sangdrol à l'adresse de M. Chirac, M. Jospin, et M. Védrine.
URGENT: Aide aux prisonniers et anciens prisonniers tibétains : CAPT
LISTE DE PRISONNIERS Gyaltsen Drolkar Jampel Changchub Jamphel Sherab Jigme Gyatso Jigme Yanchen Kalden Ngawang Choezom Ngawang Jungney Ngawang Pelkar Ngawang Phulchung Ngawang Sangdrol Panchen Lama Phuntsog Nyidron Phuntsok Wangdu Rinzin Wangyal Samdup Sholpa Dawa Tenzin Thubten
SOURCE:
www.tibet-info.net
ARABIE SAOUDITE
Les femmes mineures à vie
Si les femmes ont gagné du terrain en termes de droits économiques et peuvent créer des entreprises et des associations caritatives, leurs droits civils, politiques et sociaux sont, en revanche, systématiquement bafoués. Ce n'est qu'en décembre 2001 que les autorités saoudiennes ont consenti à délivrer des cartes d'identité aux femmes. Jusqu'à cette date, elles figuraient sur les pièces d'identité de leur tuteurs masculins (le plus souvent, le père ou le mari). Ayant à vie, donc même à leur majorité, un statut de mineure, elles ne peuvent, par conséquent, pas voyager sans autorisation écrite du tuteur. Leur liberté de mouvement est également très restreinte à l'intérieur du pays. Une fatwa a, par ailleurs, été décrétée pour leur interdire de conduire. Les femmes doivent obéir à un code vestimentaire très strict, autrement elles risquent l'emprisonnement et les mauvais traitements. Une femme qui marche seule dans la rue, ou en compagnie d'un homme qui n'est pas de sa famille, peut être arrêtée pour prostitution. De même qu'une femme jugée coupable d'adultère peut tomber sous le coup de la peine capitale et se faire lapider.
Excellent dossier consacré à l' Arabie Saoudite que je vous recomande dansLe Monde.fr
Action contre le publisexisme
Chaque jour, au travers des 2500 publicités que voit en moyenne un-e occidental-e, ces rôles sont inculqués. Le corps des femmes est marchandisé, et la domination masculine ainsi renforcée. Nous ne voulons plus que des images nous dictent inconsciemment nos conduites, nous ne voulons plus des stéréotypes de beauté, nous ne voulons plus d'une société inégalitaire où plus de 40 000 viols sont commis chaque année (chiffres pour la France). Dans la lignée des actions menées contre les Soldes, Sinéquanone, et Lavazza, la lutte continue.
Rendez-vous samedi 23 mars 2002 à 15H à la place du Châtelet.
Ni à prendre, ni à vendre,les femmes ne sont pas des objets. Publisexistes, gare à vous,on vous rendra les coups.
Collectif Contre le Publisexisme 145, rue Amelot, 75011 Paris -
contrelepublisexisme@samizdat.net
LU : France : un bien triste 8 mars !
UNE DRÔLE DE JOURNÉE DES FEMMES !
Le soir du 7 mars 2002, M. Bertrand Delanoë, Maire de Paris, a reçu les responsables d'associations de Femmes de Paris et de sa région. Il s'est déclaré fier de pouvoir offrir aux femmes une tribune pour s'exprimer et il a affirmé souhaiter voir surgir des idées nouvelles.
Je suis Présidente de l'association loi 1901 "La Femme Architecte" déclarée au Journal Officiel. Dans ce cadre, j'exprime le regard d'une féministe sur les problèmes de société contemporains : patriarcat / matriarcat, prostitution, salariat, liberté d'association (Non à la loi About-Picard !), etc.
J'ai donc répondu à l'invitation de la Ville de Paris qui me proposait un stand sur le parvis de l'Hôtel de Ville. Le Village des Associations était installé pour trois jours : les 8-9-10
mars.Pourtant, vers 14 heures le 8 mars, j'ai été expulsée manu militari par les organisatrices, les services de sécurité de la Ville de Paris et les services de maintien de l'ordre du Village. J'étais seule dans le stand quand soudain, une demi-douzaine de personnes, dont plusieurs colosses, se sont présentés devant moi et m'ont demandé de quitter les lieux dans la minute. Ils avaient le comportement des gens de pouvoir qui s'attendent à ce qu'on résiste farouchement … et ils semblaient prêts à tout. Quand je vois cette sorte d'individus, je reste sans voix et malgré les années, je n'arrive toujours pas à croire que ces gens puissent exister.
Les hommes de la sécurité ont fermé le rideau du stand afin qu'aucune autre association ne se rende compte de l'incident. J'ai demandé un peu de temps pour ranger mon matériel mais un colosse qui me surveillait m'a dit qu'il n'était pas payé pour m'attendre. Derrière ce rideau, n'importe quoi aurait pu arriver, personne n'aurait rien remarqué non plus. Si on a porté à ma place une partie de mon matériel, ce n'était que par souci impérieux de discrétion, pour que les autres membres des associations ne me demandent pas ce que je faisais là, au milieu de mon matériel, dans le centre du Village. Celles et ceux qui ont posé des questions ont reçu comme réponse que j'avais usurpé le nom d' "architecte" et que je travaillais pour le compte d'une secte… A ce qu'il paraît, <<on>> soupçonne les scientologues mais pourtant, je vous assure, de ma vie je n'ai jamais vu un scientologue en chair et en os. J'aurais pu aussi bien être internée dans un asile ce même jour (comme cela voit en France) et personne ne s'en serait inquiété puisque j'appartenais, soi-disant, à une secte.
Pour finir, un policier de la Préfecture est venu me demander mon autorisation de participer au Village des Associations. Comme toutes les formalités avaient été faites par
internet, je lui ai indiqué où il pouvait se renseigner. Après vérification, il est repassé me confirmer que j'étais bien invitée. Je dois dire qu'il m'a semblé étonné qu'on m'invite pour me jeter dehors comme une droguée, une espionne ou une criminelle.
Le lundi 11 mars, j'ai trouvé dans ma boîte aux lettres un courrier du Ministère de l'Emploi et de la SOLIDARITÉ portant la mention "Urgent". Il s'agissait d'une convocation du service de contrôle de la recherche d'emploi. Je dois me présenter le 20 mars, 210 quai de Jemmapes 75010 au bureau 608 à 11H10 pour prouver que je recherche sérieusement un emploi. La convocation précise que je peux me faire assister d'un avocat, d'un représentant d'un syndicat de chômeurs, etc. Mon revenu actuel s'élève à 2.600 F et ils menacent de me le supprimer.
Je m'insurge contre l'exploitation des Femmes telle qu'elle a été réalisée pendant ces journées, à bon compte et à leur insu, comme vitrine électorale. Les Femmes ont des choses à dire et leurs paroles ne sont pas nécessairement ce qu'imaginent et ce qu'attendent nos représentants et représentantes politiques.
J’affirme n’appartenir à aucune organisation autre que celle dont je suis la Présidente et je parle en tant que simple citoyenne qui lutte seulement pour la liberté de penser et la liberté d'expression.
Je sollicite la présence de toutes celles et de tous ceux qui partagent mon combat, le 20 mars prochain, quai de Jemmapes. Venez me soutenir !
From: Me Theryca
Palestine : Appel international des femmes
L’APPEL INTERNATIONAL DES FEMMES LE PEUPLE PALESTINIEN NE PEUT PLUS ATTENDRE…
Femmes de France, d’Italie du monde politique, associatif nous nous sommes rendues en Palestine et avons rencontré des femmes palestiniennes. Lors de ces différentes rencontres, l’idée d’un appel international commun porté par les femmes s’est imposé.
Aujourd’hui il y a urgence à ce que soit entendu cet appel des mères et femmes palestiniennes qui demandent que leurs enfants soient protégés. Il y a urgence à entendre les paroles des enfants palestiniens qui, le matin en partant pour l’école, ne savent pas s’ils en reviendront .
Nous, femmes, demandons qu’une force internationale de protection soit envoyée le plus rapidement possible pour protéger le peuple palestinien des tirs ciblés et des bombardements de ses infrastructures.
Nous, femmes, demandons, à l’Etat israélien de cesser les occupations, d’arrêter les démolitions systématiques des maisons palestiniennes Nous demandons que les colonies qui détruisent la société palestinienne et mettent en péril la société israélienne soient démantelées.
Nous, femmes, demandons que les bouclages organisés avec des pratiques d’apartheid cessent. Ces bouclages sont l’expression d’une volonté d’asphyxier l’économie, d’une volonté d’exterminer sur le plan intellectuel et relationnel une société cultivée, d’une volonté d’emprisonner et d’humilier : chaque jour, en Cisjordanie, de nouveaux check points sont mis en place. Pire, aujourd’hui Gaza est devenue une ville prison. Les camps de Khan Younes et de Rafah sont coupés du monde.
Nous, femmes, demandons la tenue immédiate d’une conférence internationale où devra être réaffirmée la reconnaissance d’un Etat palestinien indépendant, souverain et viable avec Jérusalem-Est pour capitale dans les frontières de 1967 et où devra être traitée la question du droit au retour conformément à la résolution 194 des Nations Unies. Cet appel nous réunit dans un combat commun pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens.
Mais il doit être celui de toutes celles et de tous ceux qui travaillent à la construction d’un monde sans oppression, sans violence, sans inégalité.
From: "Hélène"
mrap.camp@free.fr To sign the petition / pour signer cette pétition : peaceandwomen@aol.com
France : pétition pour des sanctions véritables contre le viol
LE VIOL, CA SUFFIT !
Les affaires de viol sont de plus en plus nombreuses à faire la une des journaux (affaires d'Albi, de Roubaix et d'Argenteuil); des viols collectifs où des jeunes filles sont violées de façon répétée, voire séquestrées et prostituées, sont banalisés sous le terme anodin de tournantes. Cependant le voyeurisme sensationnaliste et racoleur des médias ne doit pas faire illusion : le viol reste encore un crime largement impuni en France : la société refuse de voir la banalité de ce crime contre les femmes et fait tomber un voile de silence sur la souffrance des victimes.
1 femme sur 5 révèle avoir été victime de viol, tentative de viol ou agression sexuelle au cours de sa vie (1). Il y a donc dans votre entourage des femmes qui ont été ou seront victimes de viol.
Par ailleurs, les conséquences du viol sur les victimes (cauchemars, peurs, dépression, suicide, haine de soi, etc.) sont graves et durables et elles s'apparentent à celles de la torture. La torture a été condamnée comme crime contre l'humanité mais environ 48 000 viols sont commis en France chaque année dans l'indifférence générale (dont environ 40% sur des mineurs). Seul 1 viol sur 10 aboutit à une condamnation (2). Encore faut-il souligner que ces condamnations sont très inférieures à celles prévues par la loi : certes, sur le papier, le viol est puni de 15 ans de réclusion criminelle mais en fait 3 affaires de viol sur 4 sont déqualifiées en agression sexuelle et passent en correctionnelle, où la peine de prison prononcée est en moyenne de 2 ans et 6 mois (3). Souvent les accusés bénéficient d'un sursis et sortent libres du tribunal, et des affaires récentes semblent indiquer que ce laxisme judiciaire s'accentue. Pourquoi la société tolère-t'elle ces actes de barbarie contre les femmes alors qu'elle condamne la torture? (...)
Les statistiques judiciaires font apparaître que la loi est plus sévère pour un braqueur de banques et qu'un voleur de voitures a plus de chances d'être arrêté et jugé qu'un violeur. Le viol reste un des crimes les plus impunis et on peut dire qu'il bénéficie encore de la la part de la société d'une tolérance de fait.
Combien de temps encore les femmes doivent-elles se résigner et vivre dans la peur ? Combien de temps encore les femmes doivent-elles s'entendre dire qu'elles l'ont bien cherché ? Quand n'apprendra-t'on plus qu'un violeur arrêté par la police était un multirécidiviste ? Pourquoi les procès pour viol deviennent-ils souvent le procès de la victime (à qui on fait subir de multiples enquêtes et expertises où sa vie et sa personnalité sont passées au crible pour discréditer son témoignage) alors que tout est fait pour trouver des circonstances atténuantes à l'agresseur ?
Nous demandons justice pour toutes les femmes, victimes potentielles de ce terrorisme sexuel qu'est le viol. Nous en avons assez d'être traitées avec légèreté ou mépris lorsque nous osons nous élever contre cette atteinte quotidienne à notre dignité et à notre sécurité. Nous demandons une tolérance zéro pour les violeurs et les agresseurs. Les lois existent; nous exigeons qu'elles soient appliquées.
SIGNEZ LA PETITION :
http://chiennesdegarde.org
PARTICIPEZ A LA MANIFESTATION AVEC LES CHIENNES DE GARDE. SAMEDI 16 MARS 2002 à 15 heures, devant le Palais de Justice, 4, bd du Palais à Paris (métro Cité).
UNE FEMME D'HONNEUR
Ingrid Betancourt défie la narcomafia
23 février 02 : Ingrid Bétancourt a été enlevée par les FARC (Forces Armées Révolutionnaires de Colombie) lors de sa tournée électorale dans une zone non-controlée par le gouvernement.
"Il faut dénarcotiser la Colombie!" S'agissant de son combat pour restaurer la démocratie, Ingrid Betancourt ne mâche pas ses mots. Ce petit bout de femme est partie en guerre contre les narcos qui mettent son pays en coupe réglée. Avec un courage exemplaire et le peuple à ses côtés!
Silhouette légère mais détermination de poids. Ingrid Pulecio Betancourt, 40 ans, vous regarde droit dans les yeux quand elle évoque son action en Colombie. Une action légitimée par les urnes (elle est sénatrice depuis 98 avec un record de voix) et jusqu'au-boutiste.
Sa cause, c'est son pays. Ses ennemis: la corruption généralisée, les cartels de la drogue, les infamies politiques. Son but: ramener la démocratie à Bogota et briser la spirale de la misère. Ses méthodes: dénoncer les scandales, dire la vérité, croiser le fer avec la mafia.
Au péril de sa vie. En payant le prix fort. Ingrid Betancourt a essuyé les insultes, les rumeurs assassines, les menaces sur ses enfants, les tentatives de meurtre. Plus on l'attaque, plus on la mobilise. Cette femme-là a des accents sincères. Elle ne se prend pas pour la providence. Elle est guidée par sa conscience. Elle veut convaincre et a même entamé pour ce faire une grève de la faim qui l'a menée au coma en 1996. En lutte depuis dix ans, elle est devenue aussi gênante que populaire. Elle incarne la résistance et l'espoir, la dignité et la chance de tourner le dos à des pratiques qui ne sèment que la ruine, la violence et la peur.
INTERVIWEE PAR BERNART BROSSE EN AVRIL 2001
Vous avez renoncé à une vie dorée pour vous engager. Quel fut le déclic de votre combat? - Je vivais en France. J'avais 28 ans. J'étais mariée et mère de deux enfants. Une nuit d'insomnie, j'ai reçu un coup de fil de ma mère depuis la Colombie. Elle était en larmes et m'avertissait qu'on avait tué Luis-Carlos Galan, le candidat à la présidence qui incarnait l'espoir d'un renouveau. C'était il y a dix ans, la Colombie vivait sous les bombes, en pleine guérilla contre Pablo Escobar. Le pays était écartelé entre le bien et le mal. Avec la mort de Galan, on a eu l'impression que la victoire était dans le camp du crime. Mon père m'avait éduquée dans l'idée que j'avais une dette envers la Colombie, qui l'avait nommé ambassadeur en France. Je me suis dit qu'il fallait se battre pour la liberté et rentrer au pays.
Le pays était-il à ce point en danger? - C'était un tremblement de terre: on a vu le gouffre s'ouvrir devant nous. La lâcheté n'était plus de mise."Je vis avec la peur, je dors avec la peur. C'est ma compagne, elle me suit partout"
Comment faire pour s'armer de courage à 28 ans et sans expérience? - Le premier mouvement est viscéral. Il part du ventre. C'est comme une grande colère. J'étais choquée par ce que j'ai découvert en Colombie. Et j'ai choqué à mon tour pour provoquer une réaction des Colombiens. J'ai débarqué avec une vision européenne du rôle de l'Etat, je l'ai verbalisée, et les gens ont compris. Ils avaient besoin que quelqu'un nettoie la plaie. Au départ, on ne sait pas par où commencer. On y va et on quitte le champ de l'abstrait. En matière de corruption, on donne des noms! Je sais que je m'en prends à des gens très puissants qui veulent me détruire. C'est mon premier combat, pour survivre, pour me défendre. Je me bats comme une folle pour continuer.
Vous soupçonniez cette force en vous? - Disons que j'ai traversé des moments durs qui ont renforcé mon caractère. Mais je me serais volontiers passé de cette vie-là!
Comment oser s'attaquer aux cartels de Medellin, puis de Cali quand on est aussi fluette que vous? N'est-ce pas un peu insensé? - Ces considérations n'entrent pas en jeu. Seule compte la contribution en tant qu'être humain, de donner un bon exemple pour voir ensuite d'autres reprendre le flambeau. J'aurai peut-être la chance d'assister à la transformation de la Colombie. Je voudrais voir ce pays en paix et savoir que mes petits-enfants seront fiers d'être colombiens. J'ai connu une autre Colombie il y a vingt ans. La drogue s'y est implantée à cause de la corruption politique, c'est à elle qu'il faut s'attaquer en priorité.
Etre femme n'est-il pas un handicap de plus dans ce contexte? - C'est un avantage parce que la Colombie est un pays en guerre et que les hommes ont laissé la place libre. Nous subissons le machisme ambiant mais nous assumons: 70% des chefs de famille sont des femmes. Gabriel Garcia Marquez a dit que les femmes devront gouverner car elles réussiront là où les hommes ont échoué et que cette espérance appartient au XXIe siècle. Nous sommes dans un monde d'hommes où l'on règle les conflits par une balle dans la tête. L'accès au pouvoir est difficile, mais je me bats, même si on m'attaque sur ma vie privée! Je reçois des coups et j'en donne et je reste résolument indépendante.
Vous n'avez pas peur? - Je vis avec la peur, je dors avec la peur. C'est ma compagne. Elle me suit partout. Je suis prête à payer le prix, même si c'est la mort.
La démocratie en Amérique latine a-t-elle le même sens qu'en Europe? - Il faut absolument lui donner le même sens. On ne peut pas se contenter de moins. La démocratie doit être totale, elle doit s'améliorer chaque jour. Il faut se battre pour elle avec conviction. Et ne jamais se dire que tout est fichu, qu'on est battu d'avance car c'est déjà perdre dans sa tête.
Concrètement, comment agir? - Il faut dénoncer, réveiller les consciences, poser des exigences. Il faut que la démocratie apprenne à rendre des comptes. Il faut parler, désigner les corrompus, faire fonctionner la justice et punir les coupables. L'impunité prospère si tout est caché."La coca, c'est payé d'avance, léger, transporté en avion et non périssable"
Le drame de la Colombie, c'est la culture de la coca. Peut-on bâtir un avenir, notamment agricole, sans la coca? - Evidemment. La Colombie était autrefois très prospère avant que la cocaïne ne pourrisse tout. Les terres fertiles ne manquent pas, l'agriculture est riche. La coca pousse où rien ne pousse, dans la forêt amazonienne au sol acide. Le problème est social, il touche 200.000 familles exclues des bonnes terres productives appartenant aux narcos. On veut nous faire croire que l'éradication de la coca par des raids chimiques va tout régler; en fait, cela causera une catastrophe écologique dans un espace naturel fragile. Le problème est criant: pour obtenir l'équivalent de ce qu'on produit sur un petit lopin de coca, il faut trois camions de bananes, d'ananas ou de mangues, périssables, et qu'on ne peut pas transporter faute de voies de communication. Le miracle de la coca, c'est que c'est payé d'avance, transporté en avion, léger et non-périssable. Comment trouver un substitut pour les familles? La réponse consiste à leur permettre de cultiver des terres riches. Pour rappel, nous avons les meilleurs rendements d'exploitation sucrière au monde! C'est bien la preuve qu'on peut envisager une solution viable.
Les E.U. ont mis en place un plan d'action anti-coca: est-ce la bonne méthode? - Il en va de la survie de notre société. Il faut que la Colombie se libère de ce fléau de la drogue. L'intervention américaine n'est pas la plus efficace, c'est du grand show. La vraie question, c'est la réforme agraire, le seul moyen de dénarcotiser le pays.
Vous devrez en passer par Washington? - Non, notre sort se règle ici. Je veux un monde meilleur. Je veux le soutien de la rue, c'est elle qui changera les choses. Ceux qui ont tout ne souhaitent que le statu quo. Le cap, l'étoile, c'est de défendre nos idéaux.
L'an prochain, vous visez la présidence du pays. Quelle serait la première mesure si vous étiez élue? - La protection de l'enfance! Il y a urgence. Etre un enfant en Colombie, ça se paye cher: ils sont battus, abusés, misérables. L'Etat de droit doit protéger les plus faibles. Ensuite, il faut mettre fin à l'arbitraire et à la mainmise de la mafia. Regagner une légitimité, une crédibilité.
C'est une révolution que vous proposez! - Oui bien sûr. Quand tout s'écroule, il faut reconstruire.
Tout cela avec les mots? - C'est une arme très efficace. Il faut savoir l'utiliser; je sais l'utiliser.
Vous ne rêvez pas de temps en temps de frivolité, de mode ou de petits plaisirs? - De moins en moins. J'ai perdu le goût de ces choses-là. Je suis devenue ennuyeuse (rires). Ma jeunesse de coeur, je la retrouve avec mes enfants, Lorenzo et Mélanie.
D'autres femmes ont fait avancer la politique avec grandeur; elles vous guident? - Oui, mais je ne me prends pas pour une héroïne. J'aime Electre, Antigone. Nous avons, nous les femmes, quelque chose à apporter d'autant que nous fûmes absentes de la scène politique pendant longtemps. L'égoïsme, l'individualisme sont tout de même plutôt des "valeurs" masculines. Les femmes sont plus sensibles au long terme. Elles sont habituées à servir. Et en politique, c'est un plus.
La rage au coeur, par Ingrid Betancourt, Editions XO, 249 p., 20,57 euros. Envoyer la pétition par email:
EN SAVOIR PLUS: AlterFocus : Ingrid Betancourt Dossier Colombie (Dossier du Monde Diplomatique) Fiche d'information sur la Colombie (MSF - septembre 01)
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NDLR: Une version plus complète est disponible sur le
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