Le Courrier de la Marche Mondiale des Femmes contre les Violences et la Pauvreté N°35
et son additif 35bis
Reçu le 10 décembre 2003 par la rédaction
Bonjour, voici quelques textes, rendez-vous et communiqués concernant les droits des femmes, en espérant qu'ils vous seront utiles.
Ceci est un bulletin de collecte d'informations, ce qui veut dire que nous ne sommes pas obligatoirement d'accord avec tout ce qui est écrit
(sauf pour les communiqués signés Marche mondiale des Femmes)
Marche mondiale des femmes, tel 01 44 62 1 33, Fax : 01 44 62 12 34
Sommaire:
1 - Une immigration féminine.
2 - Une loi contre le port du voile
3 - "Les féministes se dévoilent"
4 - Appel des femmes à Monsieur Jacques Chirac, président de la République
, paru dans Le Monde du 9 décembre
5 - Solidarité avec Radhia Nasraoui
6 - Invitation au débat : La laïcité et les Autres
7 - Sérénade Chafik : Répudiation, Femme et mère en Égypte
8 - N° 35 Les Cahiers du Genre - La violence, les mots, le corps
9 - Additif lettre 35 Bis - Un voile sur les discriminations
1 - Une immigration féminine
Extrait de la contribution au séminaire sur " Les femmes migrantes " lors du
FSE Par Claudine Blasco (Attac France, commission Femmes, Genre et
Mondialisation)
Les études et recherches concernant les migrantes, ont l'habitude de ne traiter
que des oppressions subies par ces femmes, basées sur l'ethnicité, la classe et
le genre. Leurs apports, leurs capacités, leurs compétences, leur courage et
leur résistance sont trop souvent occultés, de telle sorte que se développe
cette fausse image de la migrante : un être faible, victime soumise, de niveau
scolaire peu élevé et en marge de la société... Pourtant, les migrantes et leurs
descendantes luttent au jour le jour, au sein de leur famille, de leur
communauté ou de leur quartier ; elles sont de plus en plus actives et engagées.
Elles prennent la parole dans les assemblées, pour revendiquer leur identité, la
justice, l'égalité et la citoyenneté. Plus résistantes que soumises, elles
veulent être des citoyennes à part entière dans leur pays d'accueil comme dans
leur pays d'origine.
Une immigration féminine.
Aujourd'hui, les migrants viennent essentiellement des pays en guerre et, ou
pauvres, et les femmes migrantes sont de plus en plus nombreuses et pourtant
invisibilités. Dans le monde, d'après le rapport 2002 des Nations Unies sur la
population, le nombre de migrants dans le monde a atteint 175 millions (3 % de
la population mondiale) ; le nombre des migrants a plus que doublé depuis 1975,
la plupart d'entre eux vivent en Europe (56 millions), en Asie (50 millions) et
en Amérique du Nord (41 millions). Or pratiquement un immigrant sur deux en
Europe et dans le monde (47 %) est une femme, en France 46,9%
(rectifié par la rédaction de JDF le 15/1/2004)
Qui sont-elles ?
En France et au Portugal, on trouve essentiellement des femmes d'Afrique du Nord
ou d'Afrique subsaharienne ; en Espagne, ce sont surtout des nord -africaines,
des latino-américaines et des philippines ; au Royaume-Uni et au Danemark, ce
sont les femmes asiatiques qui sont les plus nombreuses. En Europe d'une façon
générale, parmi les migrantes venant de pays extérieurs à l'Europe, les Turques
sont les plus nombreuses, suivies des nord-africaines (Algériennes, Marocaines,
Tunisiennes). C'est dans 3 pays, la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni que 78
% des migrantes non européennes habitent. Il y a noté que les migrations sont
essentiellement féminines vers l'Islande et le Royaume- Uni, (venant d'Inde, de
Pologne, de l'Europe de l'Est, des Philippines). Aujourd'hui, on remarque une
nouvelle vague de migrantes venant de l'ex-Urss et de l'ex- Yougoslavie. Elle a
apporté une main d'oeuvre très qualifiée et peu chère en Europe de l'Ouest, mais
aussi alimenté la traite des femmes.En fait, le nombre des femmes migrantes suit
l'augmentation de la pauvreté dans le monde. Dans l'union européenne, le nombre
des femmes et des hommes migrants a progressé régulièrement au cours des 30
dernières années (1), correspondant au début de la mondialisation financière
néolibérale et à l'augmentation du fossé séparant les pays pauvres des pays
riches. Sachant que les femmes représentent 70 % des pauvres de notre planète,
ce sont elles qui ont le plus de raison de chercher un ailleurs meilleur. Les
nouvelles politiques de concurrence, de privatisation et de libéralisation des
échanges se répercutent en premier sur la population féminine. Les femmes
travaillent plus longtemps, gagnent moins, n'ont plus accès à la formation, au
crédit. Au sein de leurs familles, elles compensent les déficits de services
publics. Tout cela ne peut que les inciter encore plus à migrer pour résister
aux conditions de vie qu'un tel modèle de société leur promet.
L'évolution des raisons du départ
La femme migrante actuelle quitte son pays, afin d'améliorer sa situation
économique et sociale, à son propre compte, et non plus pour rejoindre son mari.
Ces migrantes sont souvent célibataires, donnent priorité à leur carrière et ne
fondent une famille qu'après leur installation dans le pays d'accueil. Parmi
elles, de plus en plus, se trouvent des médecins, des professeurs, des
chercheuses, des étudiantes qui veulent poursuivre leurs études, des femmes très
qualifiées en quête d'un travail à la hauteur de leurs compétences et qui ne
trouvent à leur arrivée que des emplois de domesticité ou de services, peu
rémunérés et peu valorisants. Par exemple, 40 % des immigrantes en Suède, venant
de l'Europe du sud et de l'Est ont suivi une formation ou acquis des
qualifications dans leur pays d'origine, que l'on n'a jamais valorisé dans le
pays d'accueil. Malheureusement, les femmes migrantes en France ou en Angleterre
par exemple, qui ont un bagage culturel, universitaire ou une expérience
professionnelle importante, ne se voient proposer que des emplois sous-payés
dans la restauration et l'entretien.(2). Nous nous privons ainsi d'une main
d'œuvre hautement qualifiée, et nous désespérons ces femmes de valeur...
Des femmes migrantes invisibilisées
En France, ces femmes sont invisibles cachées par le stéréotype de l'immigré
:homme, nord-africain, peu qualifié, employé du bâtiment ou de l'industrie.
L'invisibilité des femmes migrantes est due à 3 raisons :
- Les travailleurs migrants des années 50 et 60 arrivaient seuls, sans leur
famille.
- Les femmes étaient peu présentes dans l'espace public,
- Elles travaillaient majoritairement dans le secteur informel, donc non déclaré
ou en tant qu'employées de maison. Elles sont perçues comme un bagage inoffensif
et silencieux du travailleur immigré, peu nombreuses et recluses au foyer. Elles
sont moins inquiétantes pour l'opinion publique, car sensées calmer
l'agressivité des maris et les stabiliser : le travailleur immigré rentrait le
soir auprès de sa femme au lieu de traîner dehors. Aujourd'hui leur image
oscille de la musulmane voilée, manipulée par les " grands frères " intégristes,
à la " beurette " qui cherche à s'émanciper, cachant le très grand nombre des
femmes immigrées venant d'Europe (Sud et
Est) (les plus nombreuses), d'Afrique, d'Asie ou d'Amérique latine. Leur
représentation dans la sphère publique décisionnelle (représentation
parlementaire ou dans les instances publiques ou les directions de grandes
entreprises) est quasi inexistante, anecdotique ou sert souvent d'exception à la
règle ou de note exotique. Beaucoup de partis politiques cherchent à ajouter
dans leurs listes pour les élections locales ou européennes, au moins une femme
immigrée, comme une " prime à la féminité ethnique ", mythe selon lequel
l'intégration à la française passerait d'abord par les femmes. Cependant les
partis ne laissent aucune liberté d'expression à ces élues. A ce jour, aucune
élue députée, aucune sénatrice, aucune conseillère régionale ou générale, n'est
une femme issue de l'immigration ; il y a seulement une secrétaire d'état,
quelques conseillères techniques dans les ministères, 78 élues conseillères
municipales de villes de plus de 50 000 habitants, dont 5 à Marseille. Au sein
de l'entreprise, parmi les femmes diplômées de 5 ans d'études supérieures ou
plus, aucune femme issue de l'immigration, n'a obtenu de poste de cadre, contre
38 % chez l'ensemble des femmes et 47 % chez les hommes. (chiffres INSEE,
rapport FASILD) Pourtant, l'apport financier des femmes migrantes est essentiel
pour leur pays d'origine. Plus de la moitié des femmes immigrées en France,
travaillent aujourd'hui. Mais pour les migrantes, - faut-il ici rappeler que les
conditions de travail et de rémunération des femmes en général sont pratiquement
toujours inférieures à celles des hommes ?- leur salaire est inférieur même aux
salaires des femmes autochtones. Cela a amené les femmes migrantes, (plus que
les natives de leur pays d'accueil), à travailler dans le secteur informel ou à
créer leur propre entreprise. Ainsi, même si le taux d'activité des femmes
immigrées, âgées de 15 à 65 ans reste inférieur à celui des autres françaises,
il a progressé fortement de 36 % en 1990 à 53,2 % en 2002. Elles sont plus
nombreuses que les françaises à créer leur propre entreprise, mais se trouvent
souvent cantonnées dans les services de soin ou de maison.
L'analyse des parcours des femmes immigrées
Depuis les années 70, a montré que travailler durablement pour elles dépend de
leur niveau d'études, de la maîtrise de la langue, de la situation de famille,
du contexte économique, du motif de la migration, mais surtout du pays
d'origine. Les migrantes de l'intérieur de l'Europe obtiennent plus d' emplois,
surtout moins précaires que les nord-africaines. Parmi ces dernières, ce sont
les Algériennes qui ont le taux d'activité le plus important. Ce sont en
majorité des places d'employées (52 %) que les femmes immigrées occupent. Mais
la précarité de l'emploi est plus fréquente chez les immigrées que chez les
autres femmes, et les Nord-africaines en sont les plus victimes. Temps partiel
pour 41% d'entre elles contre 34 % chez les non immigrées. Le chômage suit le
même schéma, mais diminue lorsque le niveau d'étude augmente. Il est à remarquer
que les jeunes femmes sont plus touchées que les plus âgées et que les immigrées
d'Afrique sont davantage au chômage que celles venant d'Asie ou d'Europe.
Un apport non négligeable à l'économie de leurs pays d'origine. Les transferts
des salaires des travailleurs émigrés contribuent de manière substantielle aux
recettes en devises et sont un complément majeur au produit intérieur brut.
Ainsi en 2000 ces envois de fonds ont fait accroître de plus de 10 % le PIB de
la Jordanie, ont ralenti en Egypte et en Israël la progression du déficit,
représentent au Maroc en janvier 2002 le double des recettes du tourisme. Seule
la Turquie voit une baisse de 45 % sur 5 trimestres des transferts des
travailleurs émigrés. Il est un autre apport financier, mais celui-là contraint,
des femmes migrantes à l'économie de leur pays et à l'économie criminelle
internationale, celui de la prostitution, de la traite des femmes. En Italie,
les étrangères sont la moitié des 50 000 prostituées ; la police estime qu'elles
rapportent 50 millions d'euro par an. En France, la moitié des prostituées
serait aussi des étrangères et engendrerait un chiffre d'affaires annuel évalué
à 1,5 milliards d'euro. Un réseau Bulgare à Nice, a récolté plus de 30 000 euros
qu'il a rapatrié par mandats postaux en Bulgarie et réinvesti dans l'immobilier.
Ces réseaux mafieux en retirent des sommes colossales de l'ordre de plusieurs
milliards d'euros par an qu'ils placent dans les paradis fiscaux où le
réinvestissent dans leur pays d'origine, dans des entreprises, ou l'
immobilier.Ils incitent ainsi ces pays à fermer les yeux sur la traite de femmes
et à vouloir régulariser ce trafic pour ces dividendes dans leur PIB....
Mais le rôle économique des migrantes ne se réduit pas à leur apport financier.
Elles sont porteuses de développement durable, de formation, de transfert de
technologie via les projets associatifs, de transformation de leur société
d'origine et de leur société d'accueil. De même, par leur travail domestique
elles assurent la reproduction de la force de travail dans le pays d' accueil,
la leur d'abord, celle de leur conjoint, de leur famille, et la formation de
leurs enfants. Les migrantes ont créé en France, dès les années 70 des
associations (groupe femmes algériennes, collectives femmes immigrées, collectif
des femmes du Maghreb, les Yeux Ouverts, les nanas beurs, etc) qui se sont
multipliées pour construire des solidarités entre ici et là-bas, au carrefour
entre les luttes féministes et les mouvements de l'immigration. Les ONGs de
femmes ont aussi créé des réseaux euro méditerranéens de femmes dans la vie
économique et pour le développement durable. Il existe en France de nombreuses
associations de ressortissants très actives, qui souvent soutiennent des projets
de développement dans leurs pays d'origine, pour développer la création
économique, l'épargne, le crédit, l'accès à la terre ou à la formation des
femmes. De même beaucoup d'associations luttent pour les droits des femmes
(association des sans papiers, Marche mondiale des femmes, etc...) notamment
celui de l'accès aux richesses et au travail et au droit de libre circulation.
Aucune statistique officielle ne traduit l'apport majeur de ces actions de
développement . Comme souvent, le travail des femmes reste invisible et non
comptabilisé dans les budgets officiels. Il est vrai que ce serait difficile à
chiffrer tellement l'impact de ces actions est à très long terme. Quand on
redonne confiance à une femme en ses capacités, c'est souvent tout un groupe
familial et social que l'on touche et qui va pouvoir sur plusieurs générations
développer les capacités révélées. Reconnaissons la valeur de leur travail et de
leur parole, rendons visible leur apport économique et culturel. Elles sont nos
égales, traitons les avec le même respect que nous désirons pour nous : une
guerre, une crise économique, un futur désespérant et nous sommes tous et toutes
des migrants potentiels....
2 - Une loi contre le port du voile
Nous nous prononçons pour une loi contre le port du voile, dans le cadre de
la protection de l'enfance et des droits des femmes. Il est urgent de réagir!
Défendre une loi contre le port du voile, ce n'est pas s'attaquer aux religions
!
Contrairement à ce que certains prétendent, accepter le port du voile ce n'est
pas respecter l'Islam mais c'est soutenir une lecture particulièrement sexiste
et intégriste du Coran. Le voile est un DANGER pour les femmes issues de
l'immigration, mais aussi pour toutes les autres parce qu'il constitue le signe
d'une ségrégation. Il vise à faire intérioriser aux filles et aux femmes
qu'elles sont des êtres humains inférieurs coupables d'inspirer le désir aux
hommes.
Dès l'enfance, le port du voile atteint l'intégrité physique des filles,
véhicule une image dégradante de la féminité et met en cause la constitution
même d'une identité féminine.
Il est dangereux pour les filles comme pour les garçons de diaboliser le corps
des femmes. Une telle attitude conduit à supprimer la pensée même du droit à la
liberté sexuelle pour les femmes comme pour les hommes.
Aujourd'hui déjà bien des filles n'ont plus la liberté de s'habiller comme elles
le souhaitent. Si nous laissons cette régression s'installer nous risquons
d'encourager le passage de l'insulte à la violence sexiste. De plus, rappelons
nous que 80% des agressions sexuelles sur des enfants et des femmes sont
commises par des proches dans les familles ou par des hommes connus des
victimes. Le voile ne préserve donc d'aucun danger !
L'expérience douloureuse des femmes de nombreux pays de notre planète montre
qu'il s'agit pour les tenant du voile de barrer la route à toute volonté
d'émancipation pour les femmes.
Interdire le voile constitue le premier pas vers une éducation non sexiste. Il
s'agit d'une mesure de protection de l'enfance.
Nous refusons des relations entre les garçons et les filles qui ne
fonctionneraient que sur l'interdit, la séparation et non sur le vivre ensemble.
Un autre monde est possible, un monde de respect et d'égalité entre les femmes
et les hommes, un monde de liberté pour toutes et pour tous. C'est notre choix !
Nous qui nous réclamons du mouvement féministe et y participons, parfois
depuis les années soixante dix, nous voyons dans la querelle du voile un
symptôme de régression a l'œuvre dans notre société. Tout notre combat a
contribué à faire reculer la coutume qui opprime le plus faible au profit de la
loi qui le libère. Interdits sur la liberté de disposer de son corps, viol,
inceste, violences conjugales, excision faisaient et font partie de la tradition
millénaire de domination des hommes sur les femmes. Les lois conquises, sur
l'avortement, le viol, la parité - ont gagné du terrain sur la violence et
l'obscurantisme. Et voilà qu'une nuée de voiles exhibée par des adolescentes,
qui font consciemment ou pas le jeu des intégristes, remet en cause les
principes fondateurs de la République et en même temps les acquis de notre
mouvement. Par quel enchaînement de démissions et de lâchetés en sommes nous
arrivés là ? Comment peut-on en effet confondre soumission volontaire et libre
choix, tolérance et absence de tout interdit, respect des cultures et
complaisance à la barbarie ? Il n'y a pas à tergiverser. Le voile est humiliant
pour les femmes qu'il assigne à une place de proie et pour les hommes qu'il
assimile à des prédateurs. Le voile est une trahison pour toutes les musulmanes
qui ici et ailleurs se sont battues pour ne plus le porter. Le voile est le
signe que le patriarcat, que l'on croyait bien fatigué, renaît de ses cendres
sous sa forme la plus rétrograde et virulente : l'islamisme radical. Celui-ci
rencontre le soutien complaisant de ceux qui naguère fustigeaient " l'opium du
peuple " : une grande partie de l'extrême gauche, des mouvements alter
mondialistes et même de certaines "féministes"Š Sans compter bien sûr celui des
Églises, trop heureuses de pouvoir soutenir une offensive anti-laïque. Le voile
est un test : déjà sont remis en question, ici et là, la mixité des classes et
celle des heures de piscine, les programmes scolaires, la neutralité du service
public hospitalier, judiciaire ou universitaire. Accepter le voile, c'est ouvrir
la porte à d'autres demandes et d'autres surenchères. Le voile démontre que les
acquis sont toujours fragiles et que le combat et la réflexion féministes, loin
d'être dépassés, sont plus que jamais actuels. La lutte exemplaire des "Ni putes
, ni soumises" est là pour le rappeler. Nous sommes sensibles aux difficultés
rencontrées par les jeunes filles issues de l'immigration. Seule une loi les
protégera de la contrainte du voile : celles qui le refusent et celles qui y
voient le seul moyen de se soustraire aux agressions machistes. Seule une loi
soutiendra les paroles des musulmans laïcs alliés de la République et dissociera
l'Islam de ses dérives les plus archaïques. Des féministes de la première heure
: Catherine Deudon , auteur de " Un Mouvement à soi. Images du Mouvement des
femmes "(Syllepse) -Liliane Kandel, coauteure de " Chroniques du sexisme
ordinaire " publiées sous la direction de Simone de Beauvoir dans Les Temps
Modernes (Le Seuil ) - Annie Sugier, présidente de la Ligue internationale du
droit des femmes-et Anne Zelensky, présidente de la Ligue du droit des femmes,
cofondée avec Simone de Beauvoir, auteurs de " Histoires du MLF "(Calmann Levy.)
Contact : Ligue du droit des Femmes, téléphone : 01 45 85 11 37
4 - Appel des femmes à Monsieur Jacques Chirac, président de la République ,
paru dans Le Monde du 9 décembre
Dans quelques semaines, la commission Stasi rendra son avis sur la question
du port du voile à l'école. A cette occasion la classe politique devra se
déterminer sur l'opportunité d'une loi. En tant que garant de la Constitution,
nous vous demandons solennellement, qu'au delà du principe de laicité auquel
nous sommes toutes profondément attachées, vous défendiez avec la plus grande
intransigeance le principe d'égalité des sexes. Principe inscrit dans le
préambule de la Constitution et pour lequel les femmes de ce pays se sont
battues et se battent encore. Accepter le voile islamique à l'Ecole et dans
l'administration publique, c'est légitimer un symbole visible de la soumission
de la femme dans les lieux où l'Etat doit être garant d'une stricte égalité
entre les sexes. Le voile islamique nous renvoie toutes, musulmanes et non
musulmanes, à un statut inférieur de la femme qui est intolérable. Toute
complaisance à cet égard serait perçue par chaque femme de ce pays comme une
atteinte personnelle à sa dignité et à sa liberté. En conséquence nous demandons
une loi qui apporte une clarification précise par rapport aux textes existant (
loi de 1905 et arrêté du Conseil d'Etat de 1989) qui sont trop souvent source
d'interprétation et de confusion. Cette loi ne doit pas seulement réaffirmer le
principe de laïcité en interdisant les signes visibles religieux dans l'espace
public, mais doit également énoncer clairement le principe d'égalité entre les
hommes et les femmes. Par ailleurs réaffirmer ces principes à l'intérieur d'une
loi ne peut être que la première étape d'un projet global d'intégration mis en
place par le gouvernement et qui rassemble les citoyens de ce pays quelle que
soit leur confession et leur origine autour des mêmes valeurs démocratiques et
républicaines. Nous sommes sûres, Monsieur le Président que vous ne pouvez pas
rester insensible à la cause des femmes des quartiers qui dénoncent aujourd'hui
la dégradation de leur condition de vie et la régression de leur statut. Leur
combat est également le nôtre, tout comme le combat pour la défense des femmes
est celui de tous les démocrates. Nous toutes citoyennes de ce pays attendons de
la République un symbole fort pour défendre nos droits et de vous Monsieur le
Président un soutien indéfectible à notre cause légitime. Sinon l'égalité et la
laïcité ne seraient que des mots creux.
Déclaration de l'Association tunisienne des femmes démocrates L'avocate et
militante des droits humains Radhia Nasraoui, à son 45ème jour de grève de la
faim, est toujours déterminée à poursuivre son action pour la défense de ses
droits : o En tant que militante, elle exige la levée du contrôle policier sur
ses communications, sur ses déplacements et sur son domicile, l'arrêt des
pressions sur les membres de sa famille allant jusqu'à la priver d'emploi.o o En
tant qu'avocate, elle réclame la cessation de toute violation de son cabinet et
ainsi que la récupération des dossiers et matériels qui ont été dérobés lors des
différentes incursions, la fin des intimidations sur ses clients.o o En tant que
citoyenne, elle demande le respect de sa dignité et de son intégrité, la liberté
d'expression et de circulation, l'instruction des plaintes qu'elle a déposé
auprès des tribunaux.o
L'Association Tunisienne des Femmes Démocrates exprime son soutien à Radhia
Nasraoui pour l'ensemble de ses revendications légitimes et considère que son
action s'inscrit dans le combat global pour le respect des droits humains. L'ATFD
considère que le choix de la grève de la faim comme forme d'action témoigne de
l'impasse dans laquelle l'ont acculé les autorités qui ont répondu par le
mutisme et la poursuite des pratiques coercitives face à ses différentes
plaintes et revendications. L'ATFD juge que la lutte contre la répression
nécessite la mobilisation de toutes les forces démocratiques et appelle
celles-ci à se joindre à elle pour convaincre Radhia Nasraoui que la meilleure
réponse aux dénégations et au mépris officiel de son droit à la vie est la
préservation de sa santé et de ses énergies afin de continuer à s'investir
ensemble dans le combat en faveur de la démocratie et des libertés.
P. Association Tunisienne des Femmes Démocrates
La Présidente
Héla Abdeljaoued
Téléphone : 216 71 794 131 Fax : 216 71 799 225 Email :
atfd@planet.tn
6 - INVITATION au débat : La laïcité et les Autres
Citoyennes des Deux Rives a le plaisir de vous inviter à une rencontre autour
du thème : : La laïcité et les Autres, Le 13 décembre 2003 à 15h00
FIAP, 30 rue Cabanis Paris 14ème, (métro Glacière)
o 15h10, Sama Aouidha Centre des Eudes Féministes, Jérusalem
o 15h30, Huda Aldin Arazak, ancienne journaliste irakienne
o 15h50, Michèle Sibony, Union Juive Française pour la Paix
o 16h30, Hichem Abdessamad, FTCR
o 17h00, Débat
o 18h00 PausePossibilité de restauration sur place (merci de reserver o 20h00,
Présentation de L'Occident et les autres o Avec la participation de oSouheyr
Belhassen, Ligue tunisienne des droits de l’Homme o Madelaine Mukamabano, RFI /
France Culture o Driss El Yezami, FIDHo
En présence de Mohamed Harbi, Jean Chesnaux et Sophie Bessis
" Dans ce monde brouillé par la rapidité des mutations qui alimentent les peurs
des uns, les frustrations et les aspirations des autres et les incertitudes de
tous, chacun tente de trouver ou de retrouver des repères en rebâtissant des
mythes ou en se construisant de nouvelles citadelles. En contraignant chacun à
reconnaître l'existence de l'autre, le rétrécissement du monde a également
sophistiqué les formes de sa négation ou de sa diabolisation. Jamais les
constructions identitaires antagoniques n'ont connu de tels succès, en se
nourrissant les unes des autres. Les mondes qui se partagent inégalement une
planète de plus en plus ouverte s'affrontent et se rencontrent à la fois, se
redéfinissent les uns contre les autres tout en s'imbriquant de plus en plus les
uns dans les autres. Quelque chose pourra-t-il naître de ces fantasmes croisés,
de ces haines réchauffées, de ces actuelle des relations humaines ? " Sophie
Bessis " L'Occident et les autres " La Découverte, p. 232
7 - Sérénade Chafik : Répudiation, Femme et mère en Égypte : loin des
splendeurs pharaoniques, la terrible réalité.
Michel Lafon, 2003 (Témoignage) 20 Euros
Il faut acheter, lire et faire lire le livre de Sérénade Chafik car c'est un
témoignage de vie, bouleversant et émouvant mais c'est aussi un récit de combat,
au sens profondément féministe et politique. C'est un sacré pari de faire
découvrir en France aux lecteurs et lectrices, à travers son histoire et celle
de sa fille Laïla, la réalité du scandale absolu de l'excision. Car c'est un
fait méconnu, dérangeant, incroyable : la quasi totalité des femmes est excisée
en Égypte et cette pratique, loin de diminuer, trouve aujourd'hui des soutiens
dans tous les milieux. Au cours d'un récit captivant et poignant, on approche de
l'intérieur presque 40 ans d'histoire et de la vie quotidienne des femmes
égyptiennes, leur assignation à être de perpétuelles mineures mais aussi leurs
espoirs et leurs luttes. On découvre également les compromis dangereux entre les
mouvements d'opposition de gauche et les fondamentalistes musulmans, ces
alliances contre nature toujours faites sur le dos des femmes. On s'indigne
enfin des effets pervers sur la vie d’une petite fille de l'application sur le
sol français de lois égyptiennes scandaleuses, conséquence d'accords bilatéraux
rédigés au nom d'intérêts supérieurs c'est à dire stratégiques ou économiques.
Un livre à découvrir et à partager : nous n'avons pas souvent entre les mains un
ouvrage émouvant et facile à lire et qui se prête aussi bien aux échanges et au
débat du côté des filles et avec les garçons.
COMITÉ DE SOUTIEN A SÉRÉNADE ET LAÏLA
Collectif " Encore Elles ! " ( MFPF, ANCIC, AC!, Collectif " Égalité?Mixité " UD
CGT 44, GASPROM ASTI, G10Solidaires, École Émancipée, LCR, les Alternatifs), LDH,
COLIF, Femmes Solidaires, UD CGT 44, SUD Caisse d'Épargne, les Verts, SUD
Éducation Pays de la Loire, CNL, St Herblain Autrement, SNUipp, FSU 44, Le Nid
44, PCF, MRAP, SMG44, Fédération PS 44, La Luna (collectif de plasticiennes),
Collectif national " Femmes/Mixité " CGT, D'une Rive à l’Autre, association "Les
Filles"
8 - N° 35 Les Cahiers du Genre
La violence, les mots, le corps A l'occasion de la sortie du n°35 (novembre
2003) des Cahiers du Genre La violence, les mots, le corps Coordonné par
Dominique Fougeyrollas-Schwebel, Helena Hirata, Danièle Senotier, La revue
organise une réunion-débat le vendredi 9 janvier 2004, de 14 h à 17 h à l'Iresco
59 rue Pouchet 75017 Paris, métro Brochant ou Guy Moquet Bus 66, arrêt La
Jonquière
Sommaire du numéro
Dominique Fougeyrollas-Schwebel, Helena Hirata, Danièle Senotier : Introduction
Françoise Héritier : Quels fondements de la violence? Dominique
Fougeyrollas-Schwebel, Maryse Jaspard : Compter les violences envers les femmes.
Contexte institutionnel et théorique de l'enquête ENVEFF Marylène Lieber : La
double invisibilité des violences faites aux femmes dans les contrats locaux de
sécurité français Corinne Lanzarini : Survivre à la rue. Violences faites aux
femmes et relations aux institutions d’aide sociale Michèle Salmona : Des
paysannes en France: violences, ruses et résistances Marie Pezé : Corps et
travail Claudia de Gasparo : Harcèlement moral et sexuel: une approche
sociologique Enquête : Maria Bernardete Ferreira de Macêdo : Femmes de ménage et
veilleurs de nuit : une approche sexuée du travail précaire dans un hôtel en
France Hors-champ : Dominique Memmi : Une situation sans issues? Maîtres et
domestiques dans le cinéma anglais et français
9 - Un voile sur les discriminations décembre 2003
" L'affaire du foulard " est devenue un débat national, le débat national :
on ne parle plus que de cela. On y apprend des choses : que pour nombre d'hommes
politiques l'égalité entre les sexes est une priorité - tiens ! Tandis que pour
certaines féministes, c'est dans la lutte contre l'islam, intégriste - forcément
intégriste-, que se joue le sort des femmes en France. Re-tiens ! Des alliances
inimaginables il y a quelques mois se forment, des fronts laïco-féministes qui
ont pour dénominateur commun un fonds de fantasmes apocalyptiques : le "
salafisme " et le " wahabisme " sont aux portes de nos mairies, prêts à piétiner
notre constitution, et leurs fourriers sont quelques dizaines de femmes "
voilées " qui semblent ne demander qu'à porter leurs foulards en paix. Mais que
demanderont-elles après ? Il faut retrouver la raison, et en particulier la
raison féministe : les jeunes filles et les femmes qui portent le foulard ne
sont pas la cinquième colonne d'une puissance étrangère, elles sont d'ici,
partie intégrante de notre société même si doublement exclues en tant que femmes
et en tant que groupe social. Et la France n'est pas près d'être transformée en
république islamique. De telles peurs feraient rire si elles ne révélaient une
crispation identitaire française, un rejet qui est aussi fort aujourd'hui qu'il
l'était il y a quarante ans ou cent cinquante ans. On ne compte plus les "
vrais-faux " lapsus qui transforment, dans la bouche des politiques et des
journalistes, des citoyen-nes français-es en immigré-es pour l'éternité. C'est à
qui exhibera le plus fort " complexe de Charles Martel " : si on ne peut pas les
arrêter à Poitiers, au moins leur interdira-t-on l'entrée des écoles, des
administrations, des hopitaux, etc. ! Ne pouvant les renvoyer " chez eux/elles "
puisque qu'ils/elles sont ici chez eux, on peut - on sait faire - les traiter en
citoyen-nes de seconde zone, en indésirables, en caste inférieure.
Et c'est là que réside le problème, le seul et l'unique problème républicain, de
la république et pour la république, sur lequel le débat du foulard tente de
jeter un voile pudique, sans y parvenir tout à fait ; en témoigne cet intérêt
tout neuf pour la discrimination. Cette notion était jusqu'à hier inconnue en
France : puisqu'il n'y a pas de races, il ne peut y avoir de discrimination
raciale. S'il y en a, on fait semblant de ne pas la voir, car la voir
conforterait la notion de race, donc le racisme. Ce raisonnement, ubuesque ou
kafkaïen- selon qu'on est témoin ou victime -, la France est le seul de tous les
pays du globe à le tenir. Et tant qu'elle le tiendra, et refusera de donner aux
descendants des peuples qu'elle a colonisés, l'égalité promise par sa
constitution, par sa loi interne autant que par ses obligations internationales,
la France aura des problèmes ; des foulards, dont l'interdiction exacerbera la
visibilité au lieu de la réduire, mais peut-être aussi d'autres réactions
d'amertume un peu plus méchantes de la part des groupes discriminés. "Qui sème
l'injustice récolte la colère ", non ? On ne peut pas constamment mépriser,
écraser, exclure sans provoquer un jour des révoltes. Et la France ne pourra
tenir sa promesse d'égalité tant qu'elle refusera de regarder en face
l'inégalité illégale tous les jours perpétrée : la discrimination permanente à
tous les niveaux, emplois, école, administration, logement. Il n'y a pas un acte
de la vie quotidienne qui soit indemne de racisme à l'égard de ceux que notre
histoire coloniale continue à nous faire considérer comme des sous-êtres.
Traquer les traitements discriminatoires, qu'ils s'exercent à l'encontre des
femmes ou d'autres groupes, relève d'un véritable enjeu de société. Cela demande
des études, dans tous les domaines, sur les mécanismes de discrimination, qui ne
sont pas le fait d'individus racistes, mais de tout le système social et de tous
ses acteurs, consciemment ou inconsciemment ; et cela demande de construire des
outils de lutte efficaces - qu'on les appelle "action positive" ou "action
volontariste", "aménagement territorial" ou "politiques anti-ségrégation " -
pour faire de la fin de ce système, et de la souffrance qu'il induit, une
priorité absolue.
Pour l'instant, ce pays vit très bien avec ces discriminations, ou du moins le
croit-il, et applique de facto sinon de jure le système de la préférence
nationale (favorisant les Français "de souche") et de la préférence masculine
(favorisant les hommes) de façon éhontée. Et l'on veut encore ajouter une loi
inique et raciste au contentieux ? Comment des féministes peuvent-elles soutenir
une loi qui aboutit à exclure des jeunes filles de l'école, souvent leur seul
lieu d'émancipation, pour les renvoyer à un milieu familial censé les opprimer ?
Chacun sait que cette loi qu'on nous présente comme " une loi pour la laïcité "
vise en premier lieu le foulard, en tant que signe visible d'une religion
crainte et fantasmée, celle des " nouvelles classes dangereuses ". Rappelons que
dans le Haut-Rhin, le Bas-Rhin, et la Moselle, les ministres du culte sont
salariés par l'Etat, qu'il dispensent des cours religieux dans les écoles
publiques (pour les catholiques, protestants et juifs seulement) et que
curieusement ce dispositif ne serait pas affecté par la loi. D'où l'évidence de
son caractère discriminatoire qui ne fera qu'agrandir les lignes de clivage et
les fractures sociales. Aussi manifestons-nous très fermement notre opposition à
toute loi stigmatisant l'islam, et les femmes musulmanes en particulier, et en
appelons-nous à un débat de fond sur toutes ces questions à travers des
discussions, contributions, rencontres, débats publics, à lutter ensemble, en
tant que démocrates et féministes, athées ou pas, voilées ou pas, contre toutes
les discriminations et pour l'égalité.
Féministes pour l'égalité
Signataires : Christine Delphy, directrice de Nouvelles questions féministes,
Marina Da Silva, journaliste, Joss Dray photographe, Anne-Marie Camps, Geneviève
Sellier, professeure en études cinématographiques, Geneviève Clancy, poète et
philosophe, Danielle Bleitrach sociologue. la pétition féministes pour
l'égalité, un voile sur les discriminations est à signer directement sur :
http://www.islamlaicite.org/rubrique13.html
Pour tout contact : Marche Mondiale des Femmes, 104 rue des Couronnes, 75020 Paris Tel : 01 44
62 12 33 Fax : 01 44 62 12 34