8 Mars 2007 : Journée de la Femme !
Document reçu en provenance d'Haïti - Port au Prince
Seigneure, je suis une parente, une sœur, une épouse, une fanm / concubine, une amie de victimes et de bourreaux. Comment te parler ? Comment te dire le fond de mon coeur sans te demander pardon d’avoir mis sur terre ces catégories de gens ; bien que je sois aussi la mère des juges, des présidents, des autres gens sérieux de la société. Mais, Pardon. Seigneure, je suis la potentielle victime des gangs, des bandits et des groupes armés qui sèment le deuil dans ma famille, dans ma communauté et dans ma ville mais je suis seule à le savoir ? Ma nation et l’internationale pleurent avec les autres femmes victimes dans le pays mais moi, assassinée, mutilée, et torturée par mes propres entrailles-ravisseurs, qui s’occupe de moi ? Mes cris de mère dévastée par la cruauté et la froideur de mes brigands avec qui je négocie à chaque heure la libération d’un autre enfant (le frère, la sœur du bourreau) d’un époux ou d’un nonm (père ou beau-père du bourreau), ne sont entendus par PERSONNE puisque je suis censée être mère, sœur, épouse de ces malheureux bourreaux. Mes souffrances sont celles qu'ont connues nombre de familles à travers le pays et dans les pays de guerre. Journalière ment, je mets en terre un-e proche broyé-e par une machine infernale de violences barbares qui s’est permis de kidnapper, de torturer, de violer, d'assassiner sans scrupules mais on s’en fout. Seigneure, montre moi comment rester femme et me taire face à de telles cruautés, comment être mère et admettre que mes enfants, de 6, 13, 20 ans soient devenus des hors la loi, des criminels, parce que les institutions étatiques n’existent pas. Comment regarder les mères éplorées, après avoir découvert le cadavre en putréfaction avancé de leurs enfants étranglés par ces agresseurs qui ne sont que mes fils et mes époux ? Seigneure, non, je n’en peux plus, je veux parler maintenant ; Donnes moi la force de vivre avec espoir que les organisations de femmes à travers le monde, les Citoyennes, Citoyens, membres d'organisations des différents secteurs constitutifs des mouvements populaires, organisations de défense des droits des femmes et des droits humains en général, institutions et organismes d'appui aux organisations de base, un jour se pencheront sur la situation des femmes de ma commune et travailleront à ce que ces criminels, nos hommes et fils, auront à rendre compte de leurs actes, et que leurs crimes soient punis selon les prescrits de la loi et non selon le desiderata de nos dirigeants et de nos contrôleurs. Et que par surcroit, l'autorité de l'État sera rétablie et que la situation socioéducative de nos enfants sera prise en charge par ceux et celles qui ont la responsabilité de garantir notre sécurité et d’assurer notre protection. Seigneure, quand j’entends l’appel de rejoindre des actions collectives de solidarités avec les familles victimes, je m’attendais à y prendre part et à y participer ; mais personne n’a voulu de moi, c’est fermé à une catégorie de gens. Quand j’ai essayé de me faire entendre, on me demande de laisser mon quartier si je ne veux être considérée comme étant une Manman Baz (cheffe de zone). Mais Seigneure, entre les mains de qui nous allons laisser nos enfants, que va devenir notre commune. Toi comme moi seigneure, nous savons que ce n’est pas la meilleure solution. Beaucoup d’entre nous qui ont pu le faire sont revenus humiliées, brisées, et plus pauvres qu’avant et pire, la violence existe pi mal (pire). Alors, je ne veux plus me Taire, je ne veux pas laisser ma zone et je ne veux surtout pas d’autres martyrs. Je veux et j’exige des dirigeants responsables qui m’éviteront d’autres martyrs de l’insécurité. Je vous signale Seigneure ma détermination à vivre dans ma commune où doit régner la justice et le droit. Vous allez devoir l’expliquer à nos dirigeants à titre de garant de la loi mère, pour leur signifier : Mon refus de continuer à mettre au monde des enfants légitimés à être source de la mort au sein de la population. Aux organisations de femmes ; mon refus d'accepter l'indifférence de leur part devant les corps mutilés de mes enfants, mes sœurs, mes frères, mes camarades du seul fait que ce soient mes propres enfants, pères, frères, hommes les bourreaux et/ou que je ne sois de la même classe qu’elles. Interpellez chère seigneur ma ministre à la condition féminine de qui j’entends et j’attends beaucoup de bonnes choses, à considérer la spécialité de mon case (cas) et donne moi, enrichis moi des journalistes enquêteuses qui vont se pencher sur la situation des femmes et des filles de ma zone. Seigneure, je vous en prie, Soyez ou Devenez Femme ! Envoyez moi une personne, une bonne, une dirigeante, responsable, digne et à la hauteur de sa fonction. Merci d’avance Seigneure pour un nouveau mouvement de femmes solidaires à la construction de cette future commune juste. Égalitaire et dirigée par une femme le 8 mars, journée de la femme 2007. Ara Haïti, Cite Soleil 3 février 2007 L'histoire des Cris: Le Cri 2007 Le Cri 2006 - Le Cri 2005 - Le Cri 2004 - Le Cri 2003 - Le Cri 2002 - Le Cri de Suzanne
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